Ramo

Ramo

Après tous les désastres, dans une jungle parsemée des souvenirs de l’homme, un toucan retrouve des claviers, une drum machine abandonnée, et décide de transformer la lumière en musique. C’est l’histoire qu’on se raconte en écoutant ce nouvel EP de Ramo, avec ses rythmiques organiques comme autant de pluies dansantes, ses voix multipliées comme prises dans l’écho du grand air, ses refrains hypnotiques et sa pureté mélodique.

On y éprouve l’inquiétude de l’époque, chantée par un enfant qui aurait décidé de tout reprendre à zéro, et chuchote aux adultes que puisque tout est fini, « alors on n’a plus rien à perdre à tout recommencer » (Demain sera superbe). On s’ébat dans un bain de soleil et de présence pure (Soleil). On y ressent aussi la nostalgie de la saison des pluies ; dans un monde qui se réchauffe toujours plus, le désir des rivières (entonné avec Loïc Fleury d’Isaac Delusion dans La saison des pluies). On y sent surtout le réconfort des machines, leur sensualité inattendue, la chaleur des basses séquencées et la douceur d’une 808 qui vous prend dans ses bras (Tendresse). Et alors on y noue un pacte : celui, plutôt que de déplorer ce monde, d’y traquer les restes de beauté (Au coeur de la beauté).

Ce pacte là, sincère et généreux, dans une époque où tout nous enjoint à baisser les bras, rayonne sur tout l’EP de Ramo. Sa musique témoigne d’un désespoir solaire : une mélancolie dansante, qui ne se contente pas de regretter ce qui pourrait être, mais qui plutôt imagine et tend la main. Et si c’est aussi dans la musique qu’on trouvait l’énergie — une énergie animale —pour se projeter, après, bien après, quand ce monde fou aura changé ?